J’étais invité à midi à une conférence de presse sur le lancement du Cercle des DRH Européens.

Je vous fais la version presse d’abord :

Le but de ce cercle lancé à l’initiative d’Yves Barou, ex Directeur Général des Ressources Humaines pour Sanofi et Thales, est de réunir une vingtaine de DRH de très grands groupes (Air France, Alstom, Areva, Converteam, Danone, DCNS, Lafarge et Thalès).

Pourquoi faire ? Pour proposer des solutions innovantes en matière d’emploi et de précarité, d’égalité hommes/femmes, d’évolution des salaires… mais aussi participer à la formation des futurs responsables RH ainsi qu’à la structuration du mouvement syndical européen.

Le Cercle tentera donc de traduire en propositions concrètes le concept de responsabilité sociale, à l’émergence de normes européennes et de faire ainsi progresser l’Europe sociale.

J’avoue que cette initiative m’a laissé un peu perplexe.

D’un côté, comment ne pas saluer un projet dont la finalité est ainsi exprimée par Yves Barou : « faire que les gens se sentent bien dans l’entreprise » ?

Comment ne pas partir avec lui dans son projet lorsqu’il indique « qu’après tout, la finalité de l’Entreprise c’est l’épanouissement de ses collaborateurs » ?

Comment ne pas applaudir à cette volonté de personnes si qualifiées et brillantes de vouloir contribuer à une Europe plus sociale, plus équilibrée et plus harmonieuse ?

Et puis il y a ces rêves exprimés par les fondateurs du Cercle : « transcender la dimension nationale des rapports Ressources Humaines », « réconcilier l’entreprise et la société« , « faire de la formation un sujet stratégique partout en Europe ».

Et cette promesse de Fernando VASQUEZ, DG Emploi, Affaires Sociales et Egalité des chances, qui indique que si le Cercle avait existé avant la crise, nous aurions épargné davantage de destructions d’emploi.

Et c’est sûrement vrai car les DRH ont un rôle fondamental sur tous ces sujets et que seule leur unité permettra de peser.

Mais d’un autre côté, il y a cette façon de construire ce Cercle des DRH que j’ai trouvée  paradoxale, un peu anachronique et élitiste.

Paradoxale parce que dans ce Cercle, il n’y a pour l’instant que 2 femmes. 3 autres « pourraient » rejoindre le groupe. Mais sur 20, c’est un peu léger quand on annonce de telles ambitions… d’ailleurs, Yves Barou était bien embêté de répondre à cette questions piquante d’UNE journaliste…On le comprend.

Anachronique parce que je crains que ce Cercle ne saisissent pas le potentiel de modernité qui s’offre à lui.

J’ai demandé de quelle manière le Cercle comptait intégrer les jeunes à ses réflexions et à son action. Des réflexions et des actions directement liées à l’avenir de l’Entreprise, sa place dans la Société, sa capacité à motiver les jeunes, répondre à leurs aspirations…

La réponse a été courte : « leurs préoccupations allaient être évidemment prises en compte, mais qu’au fond, on sait bien qu’un ingénieur a les mêmes attentes quelque soit son pays, à savoir l’autonomie ».

En fait, cette vision était si réductrice qu’il me signifiait en fait que ma question ne soulevait pas le point le plus stratégique à leurs yeux.

Car évidemment, personne ne croit que tous les ingénieurs Lettons de L’Université de Riga (pays où j’étais DRH) ont la même attente vis à vis de l’entreprise que tous les Polytechniciens français.

Cette question des jeunes et de leur prise en compte dans la construction des rapport humains de l’entreprise de demain ne m’a donc pas semblé être au centre des préoccupation du Cercle des DRH Européens.

J’espère vivement me tromper. Car ignorer les enjeux culturels et générationnels qui s’annoncent conduirait à passer à côté d’une grande partie des opportunités qu’un tel projet ouvre.

Enfin, élitiste.

Seuls les grands groupes sont représentés. Les groupes plus modestes, et les PME ne font pas partie Cercle. Or chacun sait que ce sont les petites et moyennes entreprises qui représentent la quasi totalité de l’emploi en France. Et la proportion est encore plus forte dans le reste de L’Europe dont les pays ne sont pas dotés d’entreprises si importantes que les nôtres (L’Allemagne, par exemple a un tissu économique essentiellement composé de moyennes entreprises).

Je ne comprends pas cette réticence à ne pas vouloir s’inspirer de modèles de dialogues et pratique d’entreprises plus modestes. La modernité me semble être liée à une simplicité de communication et de dialogue, de transparence et de rapidité.

Les grands groupes sont le contraire.

Alors voilà ce à quoi j’ai pensé avant d’aller manger un petit four.